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11.02.2009

11 février 1991 – Les échos

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Le prix du bonheur

Quinze ans après sa création, « La Facture » de Françoise Dorin connaît une aventure peu courante : écrite primitivement pour une femme, elle a été réécrite par l'auteur pour un homme. A la créatrice Jacqueline Maillan, succède, contre toute attente, Serge Lama. L'auteur s'est prêtée à la réécriture sans remords. Elle avait à l'origine conçu la pièce pour un personnage masculin, mais l'avait modifiée quand Jacqueline Maillan s'était montrée intéressée par le sujet.

 « La Facture », c'est le prix du bonheur. Quand l'être humain connaît des moments heureux, ne doit-il pas, en compensation, en régler la « facture » par des moments de douleur ? Autour de cette idée, Françoise Dorin a bâti une comédie dont le personnage central est à présent un imprésario auquel tout réussit. Il a beau faire, se lancer dans des opérations dont chacun peut prévoir l'issue dramatique, tout s'arrange toujours. Il a la baraka.


Pour connaître enfin ce prix à payer, il prend le plus grand des risques : il se sépare de la femme qu'il aime. Que va-t-il arriver ? Une autre femme surgit dans sa vie. Et c'est encore et toujours le refrain fastidieux du bonheur. Par chance, l'angoisse, la blessure, l'insomnie interviendront d'une façon que l'impresario n'aura pas prévue. Quand tout se règlera avec le bonheur retrouvé, une moralité sera ancrée dans la tête de l'homme trop heureux : le bonheur se paye par la peur constante qu'on a de le perdre.

La pièce est jolie, avec les vertus et les limites de Françoise Dorin. Elle hésite entre le style chansonnier, gentiment et hâtivement blagueur, et la comédie des sentiments, où l'on descend dans les zones secrètes des humains. « J'adore les parcours accidentés. En amour, la Beauce, je supporte pas », dit l'un des personnage féminin. Oui, mais, dans la mise en scène de Raymond Gérôme, la soirée est d'abord sans plus de surprises que la Beauce.

Serge Lama passe la vitesse supérieure avec Agnès Soral

Serge Lama, qui a renoncé à jouer les Napoléon, campe sans recherche un Français moyen, placide, bon enfant, attrayant et sympathique. Ses partenaires féminines, Eliane Boeri, Marcelline Collard, donnent plus d'intensité à ces duels à fleurets très mouchetés. Mais il manquait encore l'inconnue du dernier acte. Quand celle-ci arrive, tout change, s'accélère, se colore.

L'arrivée de dernière heure, c'est Agnès Soral, drôle de fille, drôle en effet, excentrique, gouailleuse. C'est une sorte de Môme Crevette des années quatre-vingt-dix, jouant d'une manière très variée les idiotes intelligentes. Dès qu'elle est là, Serge Lama passe avec elle la vitesse supérieure. On s'amuse alors vraiment, dans la salle, comme sur le plateau où « La Facture » devient enfin plus corsée et rapporte à tous plus d'intérêt.

Gilles Costaz

 

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