19.08.2023
19 Aout 2025:Les Arts Ze
Il est des spectacles qui, sans crier gare, vous griffent le cœur. Lama, d’aventures en aventures appartient à cette rare espèce. On y pénètre comme on entrerait dans une pièce sombre : prudemment. Et puis la lumière surgit, et tout s’emballe.
En deux heures d’une intensité presque féroce au confortable Théâtre Desjardins à Montréal, une distribution électrisante – le caméléon du théâtre musical Stéphan Côté, entouré des magnifiques révélations Élizabeth Duperré et Gaëlle – conduit par un Éric Paulhus bouleversant, explore l’univers de Serge Lama. Paulhus, dans le rôle-titre, irradie : drôle, fragile, fiévreux, il donne au chanteur une chair nouvelle, malade et magnifique.
Tout commence dans un éclat de voix partagée : Je t’aime à la folie, chanté à l’unisson, comme on brise un cadenas sur un coffre trop longtemps fermé. La vie de Serge Lama s’ouvre alors devant nous : ses drames, ses amours, ses cicatrices, sa renaissance québécoise, architecturés dans une mise en scène organique et inventive de Charles Dauphinais enrichie par une chorégraphie d’Alex Francoeur. Le texte de Mélissa Cardonna joue à saute-mouton avec le temps, préférant l’onde émotionnelle à la chronologie, et revisite non seulement les tubes, mais ce qui les a enfantés.
On traverse le choc : l’accident de 1965, Liliane arrachée à la vie, la douleur fichée à jamais dans les os du chanteur. Puis viennent la convalescence interminable, la mère oppressante, le père oublié, le mentor Marcel, son Napoléon, les amours qui comptent Michèle et Luana, Dalida, Barbara, les triomphes – toutes ces douleurs transmutées en or, pierre angulaire de la création lamienne.
La distribution est magistrale : Stéphan Côté impressionne par sa maîtrise du théâtre musical, promeneur agile entre intensité dramatique et élégance vocale, tandis qu’Élizabeth Duperré et Gaëlle, véritables révélations, apportent fraîcheur, caractère et puissance émotionnelle à chaque tableau.
Paulhus, lui, sidère. Sa voix touche au mimétisme, mais son jeu dépasse la simple imitation. Quand il se jette à genoux pour Je suis malade, c’est la salle tout entière qui vacille : chacun y reconnaît sa propre faille. Il ne chante pas, il se saigne devant nous :
Je suis malade,
Complètement malade…
Les images se succèdent comme des battements de cœur trop forts ; un théâtre musical palpitant, qui fait de la vie de Serge Lama non pas une biographie, mais une expérience sensorielle.
Puis la voix du vrai Serge Lama résonne : Je ne suis pas sur scène mais sachez que je vous aime et que je vous ai aimé plus que tout.
Rideau.
On sort de Lama, d’aventures en aventures essoufflée, chavirée, larmes aux yeux… mais vivante.
08:10 Publié dans 2025, Spectacle sur Serge Lama | Lien permanent | Commentaires (0)
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