18 Octobre 2005:Le Figaro

Accordéonissimots au Théatre Marigny

 

Deux beaux goinfres:

Serge Lama et Sergio Tomassi au Théâtre Marigny

 

Il y a chez Serge Lama quelque chose qui oblige aux métaphores alimentaires ou végétales. Il ose des senteurs musquées, un généreux goinfre, une énergie de festin paysan.

Après deux ans de tournée - déjà un prodige, quelques centaines de concerts -, il s'est installé pour des semaines au Théâtre Marigny, pour proposer son Accordéonissi-mots aux Parisiens. Comme le titre de son spectacle l'annonce, il est là pour traverser son répertoire avec la seule compagnie de son accordéoniste, Sergio Tomassi. Mais pas d'austérité, de minimalisme, d'étroitesse dans ce duo.

Au contraire : ces deux grands bâfreurs d'émotions empoignent les chansons et les demandent comme des Breughel, des Rodin, des cathédrales baroques, des potées au chou - la puissance, les couleurs, le plaisir. L'Algérie, Mon ami, mon maître "Vous ne pensez pas que vous auriez Bigard pour le même prix." Je rends les femmes belles, Je suis malade... Avec leurs ferveurs de conscrits et leur savoir de vieux grognards, Lama et Tomassi savent partager leur plaisir.sa crâneuse manière d'abandonner le micro dans Je suis malade. Mais cette pente est aussi riche d'instants surprenants, comme son vertige heureux dans ).

Le chanteur glisse çà et là une guirlande de calembours, quelques commentaires politiques. D'ailleurs, il lance : les entassements de pianos et de percussions dans L'accordéon midi y est pour beaucoup, l'électronique offrant aux soufflets des sons de hautbois, de flûtes, d'orchestre céleste... L'ampleur de Lama fait le reste.

Parfois, l'un comme l'autre est près de se faire saisir par le péché de complaisance. L'accordéoniste empile parfois les canapés sonores dans une démonstration technique un peu polluante.

Bertrand Dicale