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19.11.2009

19 novembre 1996 : Sud-Ouest

Articles publiés dans Sud-Ouest lors du concert de Serge Lama au Pin-Gallant de Mérignac.

 

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TROIS QUESTIONS A SERGE LAMA

 Que faut-il attendre du nouveau spectacle ?

Ce qui me fait le plus plaisir, c'est d'arriver à dépoussiérer par des arrangements nouveaux des chansons qui ont quinze, vingt ans. Cela reste un pari extrêmement difficile, parce que les gens ont une espèce de mémoire sentimentale de tout ça. Là, je suis en tournée pour six mois et ça marche en direct, ce qui n'était pas évident. J'ai fait ce métier pour être sur scène. C'est logique que ce soit l'endroit qui, plus que le studio, donne le reflet de quelque chose qui me ressemble vraiment.

Et puis il y a quatre inédits, dont « le Titanic ». Cette dernière pourrait annoncer un projet plus long et faire un spectacle musical autour. Ce qui m'intéresse là-dedans, c'est qu'évidemment les gens ne savaient pas qu'ils allaient heurter un iceberg. Ils sont partis pour un rêve qui réunissait les trois classes de la société. Cela pourrait illustrer symboliquement cette fin de siècle, avec ce bateau du progrès qui laisse ses lumières allumées au moment de sombrer, avec des airs de l'époque joués par un orchestre de fox trot et de ragtime. Un naufrage flamboyant !

Ne cultivez-vous pas les paradoxes entre votre personnage et votre inspiration ?

C'est sûr que ma carrière est ambiguë, avec peu de chansons rigolotes, mais ce sont pourtant elles qui ont fait mon succès, avec cette image marrante et populaire. « Les P'tites Femmes de Pigalle », « Superman », « Femmes, femmes, femmes » sont des titres qui ont généralement fait démarrer mes albums ; avec un attrait en parallèle pour les « Je suis malade », « Une île », tout ce grand romantisme un peu désespéré ; 80 % de ceux qui recherchent une certaine joie de vivre et une énergie. Cette image faussée provient de mon rire, de ma nature, des passages télévisés assez vivants et rigolos, ce sens de la plaisanterie qui me colle à la peau. Ce qui n'est qu'en partie vrai, pour un tiers disons : c'est mon fond mélancolique qui me pousse à composer !

Quel est votre secret de longévité ?

La passion que j'ai pu transmettre au public un peu par hasard. Notre relation est heureuse depuis le début de ma carrière, suivie du grand public à partir de 1972, ce qui équivaut à une histoire d'amour comme le dit Barbara. Même si le disque porte ce titre, « l'Ami », à prendre au sens étymologique de sympathie entre le public et moi. Je reviens en effet comme un ami régulier après avoir voyagé, bougé, sans partir au Pérou comme Lavilliers. Je rêve dans ma tête, ce qui donne ces petites histoires, et j'en ai fait énormément. Je cherche toujours des titres qui ne font pas double emploi.

Le chanteur sera demain soir à 20 h 30 en concert au Pin-Galant

Recueilli par PATRICK SCARZELLO

Sud-Ouest du 18 novembre 1996

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Serge Lama: inamovible

Hier soir, le Pin-Galant recevait Serge Lama et rarement l'on vit pareille adéquation d'une salle, de son public et de son invité. Le bilan en était prévisible : guichet fermé, communion solennelle et familiale à l'intérieur. Rappelez-vous : c'était au temps du music-hall finissant, un chanteur très français débutait avec (déjà) de la nostalgie dans la voix. Rien ne semble avoir changé : à l'appel de l'empereur, les grognards sont toujours là.

L'ambiance est imperceptiblement plus d'étendue qu'il y a quinze ans : rassuré sur les fondements d'une assurance que d'aucuns, perfides, ont pu taxer de mégalomanie, Serge Lama peut se la jouer copain, détendu, prompt à la galéjade, osant des plaisanteries de seigneur sur la « musique de maintenant » et son supposé déficit en parolier, se permettant des tours de main réussis comme à la parade en dirigeant les chœurs d 'un public ravi, qui n'a pas assez de mains pour battre le « tempo ». 

Il est vrai que la chanson à la Lama s'enorgueillit d'auteurs à sa mesure : lui-même, Alice Dona. Autre actif mis en avant : sa qualité de « presqu'enfant du terroir », amateur de bonne chère et de restaurants viandards. Le moment, privilégié au sein d'une vie de stress moyen, est à la philosophie rassasiée : pousse-café, odeurs de cigare froid, introspection distraite d'une certaine société : « ces jeunes qui se droguent sont toujours nos enfants », « les amours adultérins, c'est toujours de l’amour », lassitude d'une sensibilité molle décrite exactement par ce vers tiré d'une de ses chansons : « le cœur qui colle ». Les pianistes jouent en fond sonore jazzy, les spots colorés balaient sensuellement la scène ; l'ambiance hésite entre culture cossue et night-club cher. On croit entendre les confessions « entre hommes » d'un pilote de ligne amoureux (thème romantique) assorti de ses plaintes quant à la pension alimentaire qu'il réclame à sa femme (thème social).

Et pour ceux qui ne connaîtraient pas l'essentiel de Serge Lama, sachez que « les P'tites Femmes de Pigalle » traite avec une acuité jamais démentie du problème de la prostitution à Paris et de ceux qui la font prospérer.

Serge Lama, hier soir au Pin-Galant, Mérignac.

ANTOINE DE BAECKE

Sud-Ouest du 20 novembre 1996

 

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